« Comment draguer la catholique sur les chemins de Compostelle » de Etienne Liebig

Éditions La Musardine. 2006.

Un road-movie ! Voilà, c’est ça, un road-movie. Le titre est long (c’est à la mode) mais le chemin n’est pas court. Et si je suis ici, devant mon clavier, alors que je pourrais profiter pleinement de la canicule pour me dessécher à l’extérieur, c’est que j’ai a-do-ré. Avertissement à celles et ceux qui lisent en diagonale et auxquels les mots « catholique » et « Compostelle » sauteraient aux yeux : ce livre ne me semble pas opportun comme cadeau pour la première communion de votre nièce. Je ne vous le raconte pas, tout est dans le titre. Mais il serait dommage, comme pour le dernier Musso, de se contenter de le posséder ou de le benner pour l’anniv’ de la belle-mère sans l’avoir lu.

À la lecture, j’y ai trouvé comme une ambiance « J’irai dormir chez vous » de l’excellent Antoine de Maximy. L’auteur-narrateur nous fait vivre (à la première personne et au présent. Ça vous rappelle quelqu’un ?) son pèlerinage à la quête de l’essentiel : le sexe. Peu importe la destination, seul le chemin compte. C’est malin, intelligent, léger (pour les connaisseurs), didactique et cultivé. Étienne, le narrateur, n’aime pas Bourdieu, Onfray et Coelho. Ça nous rapproche. Bourdieu je ne connais pas, mais les deux autres… Surtout Coelho avec ses maximes, pour masses populaires incultes de tous âges, qui n’ont strictement aucun sens, genre de mémoire : « c’est en marchant que l’homme avance vers son destin. » (Je viens de l’inventer mais c’est bien dans le style qui fait se pâmer un lectorat avide d’intelligence prédigérée). Mais je m’égare. Revenons sur le chemin. Je ne sais même pas d’où me vient ce bouquin qui date de 2006 (mais qu’on trouve toujours dans le commerce. J’ai vérifié). Sans doute, attiré par le titre, l’ai-je chiné dans quelque vide-grenier de province (sûrement pas à Vézelay). Je l’ai lu, chose rarissime chez moi qui suis un laborieux, d’une traite. Et, à la fin, j’en aurais volontiers demandé encore. Une très belle écriture qu’on ne trouve presque jamais dans la littérature dite « érotique ». Un vrai style que j’envie dès les premières lignes. Une maîtrise approfondie du sujet (pas que de la drague où là… chapeau ! mais aussi de l’histoire, des lieux, des références. Je n’ai rien vérifié mais je suis certain que tout est vrai), des descriptions toujours utiles et si réalistes qu’on s’y croirait. Quant à l’essentiel, au but ultime de l’humanité (de quelque confession soit-elle), pas de chichi et ça j’aime bien. La métaphore poétique ou graveleuse retardant la fluidité de l’acte, l’auteur ne s’en encombre pas. C’est joliment cru. Mais ne l’est-ce pas dans votre réalité ? Dans la mienne ? Allons, assez d’hypocrisie !

Les différentes composantes de la communauté catholique sont analysées avec une méthode quasiment scientifique. La sortie de messe, on s’y croirait. Les dortoirs à pèlerins, on y est. Les chemins rocailleux, on s’y tord les chevilles. Et, autant le dire tout de suite, les scènes pas très catholiques, on les vit en direct. On est vraiment dans le sujet si je puis m’exprimer ainsi. Ça nous inspire. Il y a des trouvailles littéraires à chaque page. Aussi, il serait réducteur de recopier ici quelque extrait sorti de son contexte. Car le contexte est au bon mot ce que le slip est à l’homme. Il y a une façon d’en sortir quelque chose et, selon la façon, c’est réussi ou pas. Là, c’est dans le mille à tous les coups. Alors si, comme beaucoup, vous rêvez des chemins de Compostelle mais que vous n’avez pas le temps (faut quand même compter 1000 bornes à pied en partant de Vézelay), ou pas le sens de l’orientation (c’est pas tout droit contrairement à l’érection qui indique la voie au narrateur), je vous conseille la lecture de ce livre qui vous fera faire un bond extraordinaire vers la foi. Et pas que…

Avertissement préalable : Les catholiques pratiquantes pourraient s’offusquer de certaines scènes peu en symbiose avec le dogme. Mais les pratiquantes catholiques peuvent y aller les yeux fermés (sauf pour lire).

 

« Sérotonine » de Michel Houellebecq

« Sérotonine » de Michel Houellebecq

Éditions Flammarion. Janvier 2019. Bon là, je prends des risques. Avec Houellebecq, pas de demi-mesures, c’est « t’aimes » ou « t’aimes pas. » Quand t’aimes c’est sans retenue, quand t’aimes pas c’est sans exception. C’est le personnage, souvent caricaturé mais, en y...

lire plus
« Le suspendu de Conakry » de Jean-Christophe Rufin

« Le suspendu de Conakry » de Jean-Christophe Rufin

« Si les académiciens se mettent à faire dans le polar, que va-t-on devenir, nous autres, auteurs de bas étages et pourvoyeurs littéraires des trajets ferroviaires et des plages du littoral ? » Voilà ce que j’ai pensé en découvrant que Jean-Christophe Rufin, qui m’a toujours convaincu.

lire plus

0 commentaires

Soumettre un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *